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Une plume de Vérité
15 janvier 2015

Du neuf avec du vieux

 

On m'a reproché, déjà, de rester dans une poésie classique. Enfermé dans la prosodie. On m'a enjoint à me libérer de la contrainte des vers figés pour emprunter, rieur, une fleur à la bouche, les contrées verdoyantes de ces vers libérés de l'écrin de leur strophes.

Et j'étais en vers libre depuis "pour emprunter" au cas où. Je sais faire. Mais... à quoi bon ? Quel intérêt ? Ce n'est pas ma poésie. C'est de la prose. Je la ressens comme telle. Pour moi la poésie doit rimer. La strophe est la clé de voute de mon texte. Ma rythmique repose sur mon nombre de pied. Est-ce à dire pour autant que je suis figé dans un une poésie vouée à se répéter elle-même ? Je ne crois pas non.

Ici je vous offre un texte unique. Non pas dans sa forme - encore que, vous allez le voir, il sorte malgré tout de l'ordinaire, un peu, même à ce niveau-là - mais dans le thème qu'il aborde. C'est... une rareté. Une vrai. Un sourire de quelqu'un qui m'est très cher. Dame Coralie. mon mentor, que vous découvrirez sans doute encore au hasard de mes mots. Elle a parsemé ma poésie de ses graines de vérité, après tout.



Carmen (Bizet, à la guitare de Pedro Ibanez uniquement)


Et Coralie Sourit

Dans les rues de Paris la foule se compresse
Assis à un Café je regarde les gens
Face à moi agités, qui s'en vont et me dressent
Un portrait affolé reflétant l'air du temps.

Et Coralie sourit.

Soudain j'ouvre les yeux et tout autour de moi
Le monde se soulève en soubresauts puissants,
Convulsion insensée naissant de leurs émois.
Ne savent-ils donc pas être si transparents?

Et Coralie sourit.

Et puis main dans la main ne voulant nous lâcher,
Nous parcourons Paris à un rythme indolent
Guidé par notre envie d'oublier un instant
Ce demain embrumé fait pour nous séparer.

Et Coralie sourit.

Mais le voila déjà et j'attends Coralie
Assis à un Café où j'observe des gens
Dont tous les petits rien me dévoilent la vie.
Et c'en est indécent. Et c’en est fascinant.

Et Coralie sourit.

Un sourire envolé quand  je croise les yeux
Effrayés d'un enfant qu'un homme tient en main.
Un petit maghrébin, ce blanc proprement vieux
Et salement brutal dont les yeux disent "Faim".

Et mon âme en frémit.

Je capte les riens dessinant un tableau
Donnant corps à l'envie d'oser là me lever
Et arracher l'Enfant des mains de ce salaud
Voulant  lui faire mal, oh mais oui je le sais.

Et mon âme en frémit.

Je referme le poing, mes jointures blanchissent
Car oui je me contiens. Mon regard accompagne
Celui de cet enfant dont je sais les sévices.
Mon cœur à l'abandon bat soudain la campagne.

Et mon âme en frémit.

Mais que pourrais-je faire, même si je sais voir?
Comment pourrais-je dire aux gens autour de moi
Que cet homme élégant au portrait du Devoir
Est bourreau des enfants asservis à sa loi?

Et mon âme en frémit.

J'inspire à pleins poumons, et je clos mon regard
Me coupant des humains. En comptant jusqu'à trois
Je découvre la paix concise au fond de moi,
Puis je rouvre les yeux. Il est déjà trop tard

Et mon âme en frémit.

L'enfant s'en est allé, et moi je n'ai rien fait
Même si je savais. Je ne suis pas un dieu
Et mon don est béni autant qu'il est damné.
Il me faut l'accepter et  faire de mon mieux.

Et j'ouvre mon esprit

Un temps je reste là à observer les gens
Et je découvre en eux soudain ma poésie.
Ma plume vérité s'unit en cet instant
A l'étrange regard me dévoilant leurs vies.

Et j'ouvre mon esprit

Alors de l'empathie j'accepte le fardeau
Et j'use de ce don délégué par la Vie
Pour aller écarter un instant le manteau
Me masquant leurs pensées. Et soudain je souris

Jusque dans mon esprit

En déposant les yeux au détour d'un virage
Je la vois arrivant, un feu nous séparant.
Ses yeux cherchent les miens, s'éclaire son visage,
Mon âme hurle de joie. Mon cœur s'arrête un temps

Quand Coralie sourit.

Et d'un coup elle est là, et alors je lui dis
Cet enfant affolé, ce geste non osé
Si pressé de hanter. Elle me dit "C'est la vie
Qui te rend impuissant, ça n'aurait rien changé."

Et Coralie sourit.

Je saisis sa raison et j'admets sa sagesse
Mais je n'oublierai pas ce visage d'enfant
Me hurlant au secours. Il faudra que je dresse
Un beau jour son portrait. Il viendra en son temps.

Mais Coralie sourit

Et moi je la regarde de leur façon à eux,
Elle m'apparaît si belle que vient le baiser
Ce doux courant profond un petit peu furieux
Les amours passionnées de jeunes fiancés.

Quand Coralie sourit

J'en oublie jusqu'au temps, son regard me captive
Et j'y lis un amour me paraissant sans fond
S'en venant proclamer victoire décisive
Sur une âme conquise acceptant son pardon.

Et Coralie sourit.

(A Flipote)


Une plume de Vérité


Il est fort celui-là. "Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare". Je l'ai écrit d'une traite, sans vraiment me rendre compte de ce que je faisais. Je voulais simplement raconter ce moment-là. J'écris deux séries de textes, en fait, les Instants Et les Instants en ville et au départ c'était l'un d'eux que je voulais écrire. Puis j'ai songé au sourire de Coralie. A cet enfant qui me hurlait au secours. A cet homme qui allait lui faire du mal. Et... La magie a opérée. Un de mes plus grands textes celui-là. Un de ceux dont je suis le plus fier.

Il y en a un autre, cependant, qui tient une place unique dans mon oeuvre. C'est le plus cinglant démenti à tous ceux pensant que je ne fais que reproduire des formes éculées. Je vous offre ici mes...

Instantanés d'infini

Toccata prima (Ensemble Amarillis)

Nuitée de magie
Épilogue des malheurs
Inclus en nos vies.

Temps d'éternité
Abreuvant de sa chaleur
Deux cœurs enlacés.

Serment d'un bonheur
Attendant d'être crée
A coup de douceur.

Instant infini
D'une nuit à se rêver
Aussi vite enfuit.


"Quoi, vous demandez-vous peut-être ? C'est ça ce démenti ? Je ne vois pas trop ce qu'il a de special vu comme ça. Il a une forme bizarre, des pieds étranges. Et les strophes sont construites bizarrements." Certains verront plus loin "ouais, quatre Haikus. Dans les regles de l'art, ok. Oui et ?"

Et ce texte est tout autre chose, en vérité. J'ai mis des années à l'assumer celui-là. J'avais même casser sa logique en inversant deux strophes avant de le publier la première fois. Mais... Mais je vais ici vous raconter l'histoire de ses rimes.

Il était une fois au pays de la poésie un poète qui aimait jouer avec les rimes. Qui savait faire ca très bien. Chaque jeu de rythmique, d'assonnances, de positionnement, de syntaxe et autres acrostiche amusant etait pour lui un merveilleux trésor. Un véritable jeu dont les règles étaient toujours limpides et qu'il pouvait manipuler avec aisance du premier coup.

Il était logique qu'un jour, tôt ou tard, il finisse par vouloir créer son propre jeu à lui. Mais il était si compliqué que les règles étaient trop complexes pour les autres. Alors il abandonna l'idée. Mais elle fit son chemin dans son esprit. Et a mesure que la poésie devenait autre chose qu'un jeu pour lui, qu'elle     devenait une raison de vivre, un moyen de comprendre le monde, de s'y emerger il fini par découvrir d'autres façons de penser la poésie. De repenser son jeu. Il fit la rencontre d'une poésie a nulle autre pareille. Le Haiku Japonais. Et la les règles du jeu s'imposerent pour de bon.

Mais il ne s'agissait plus d'un jeu il s'agissait d'une nouvelle forme de poésie. D'une nouvelle façon d'aborder l'art. Si... surprenante qu'il n'osa d'abord pas en user de peur de ce qu'il y a decouvrirait. Et de ce que ça impliquerait de le réaliser vraiment. Mais voila la vie commande souvent à la poésie, et le poète obéit toujours à la poésie. Vint le thème et avec lui une nouvelle forme de poésie.

Regardez les rimes de ce texte. Regardez les vers externes des premières et dernières strophes. Voyez comme ils se répondent. Cela vous indique que ce poème est auto contenu, a la matière d'un authentique Haiku. Il est un retour sur lui-même. Son sens est fini. La boucle est bouclée et le serpent se mord bien la queue.

Penchez-vous donc maintenant sur les rimes centrales de ces mêmes strophes. Elles sont le lien avec celles qui les suivent. Se déplacent sur trois strophes. "eur" n'est absent que de la dernière. "é" de la première. Elles s'inversent d'une strophe centrale à l'heure. Ces rimes sont le squellette du texte, ce qui lui donne sa continuité. Elles le dirigent. L'inversent.

Il est noter que chaque strophe est pourtant effectivement un Haiku a part entière, avec son sens fini et sa propre structure auto contenue. Il ne s'agit pas de simples bricolages de vers faits pour en adopter la forme.

C'est donc ici une nouvelle forme de la poésie, fusion des poésies japonaise et française. Une pièce unique à ce jour et à ma connaissance. Je ne l'ai jamais nommée, ceci dit, cette forme. Qui sait, si un jour quelqu'un arrive à faire mieux que moi avec peut-être lui laisserais-je le droit de le faire. Maintenant que les règles sont posées n'importe qui peut jouer.


Quoiqu'il en soit, je maintiens que ma poésie est faite pour le vers classique. Et que cela ne la diminue en rien. Après... peut-être ne suis-je qu'un fol arrogant. Qui sait ?

Dehorian Green, janvier 2015.

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